Lambi Sawadogo : « Ceux qui ont abandonné Roch Kaboré sont toujours au MPP »

Porté sur les fonts baptismaux le 02 avril 2022, le Parti Panafricain pour le Salut (PPS) est l’un des nouveaux nés du paysage politique au Burkina Faso. Accueillant plusieurs anciens cadres du MPP, l’ex parti majoritaire et d’autres partis, le PPS fait son bonhomme de chemin au Burkina Faso. Alors que certains de ses membres fondateurs sont taxés de proches de l’ancien président Roch Kaboré, le parti Panafricain pour le Salut a fait de la réconciliation, un point clé de sa démarche. Pourquoi avoir choisi d’abandonner le bateau MPP ? Quelle vision pour le Burkina Faso et quelle appréciation de la transition en place, sont quelques questions que Faso7 a posées au secrétaire général national du parti, Lambi Sawadogo, le 2 août 2022.

Faso7 : Comment se passe l’encrage du parti au niveau national ?

Lambi Sawadogo (L.S) : Cinq (05) mois après sa création, le parti se porte très bien. À la date d’aujourd’hui le PPS est bien positionné dans toutes les 45 provinces et continue d’accueillir des adhésions massives. C’est l’occasion pour nous de féliciter l’ensemble des camarades qui ont cru à ce parti et qui se battent pour son implantation. Nous les encourageons d’ailleurs à poursuivre l’œuvre de mobilisation sur le terrain pour nous assurer des victoires certaines aux prochaines échéances électorales.

Faso7 : Qu’avez-vous à offrir de différent aux Burkinabè ?

L.S : Le PPS est né trouver plus d’une centaine de partis politiques sur l’échiquier politique burkinabè, mais cela ne fait pas de nous un parti de trop. Nous sommes sur le point d’absorber plusieurs partis qui nous ont devancés sur la scène. Ce qui voudrait dire clairement qu’il y aura une réduction considérable du nombre de partis politiques. Ensuite, nous avons commencé par là où tous ou ont échoué. Il s’agit de la cohésion. Le PPS est l’initiative de camarades venus de plusieurs partis de la scène politique nationale. Comprenez donc que des gens qui étaient des adversaires politiquement hier, sont devenus camarades aujourd’hui au PPS et c’est ce dont nous avons besoin pour construire le Burkina Faso.

« Certains qui ont fait le coup d’État étaient avec Roch »

Faso7 : Vous avez longtemps soutenu le président Kaboré, pourquoi avoir choisi de l’abandonner ?

L.S : Je ne voudrais pas partager l’idée d’abandon et courir le risque de m’enfermer dans la peau d’ancien militant du MPP. Nous avons choisi simplement d’être acteurs et non témoins. Des gens ont beaucoup développé l’idée de traitrise. Ceux qui ont abandonné Roch Kaboré ne sont pas au PPS. Ils sont toujours au MPP. Certains qui ont fait le coup d’État étaient avec Roch.

Faso7 : Pourquoi juste après sa chute ?

L.S : Nous avons simplement choisi de nous relever après la chute collective de la classe politique. Car, il ne s’agit pas seulement de la chute de Roch Marc Christian Kaboré. C’est la défaite de la classe politique qui nous a conduits à cette situation. De toutes les façons nous sommes en politique et si nous voulons bien prendre part aux prochaines élections en tant que parti politique, il ne fallait pas attendre la veille de la fin de la transition pour mettre en place un parti.

Faso7 : Quelles relations entretenez-vous actuellement avec vos anciens camarades du MPP ?

L.S : Nous avons de très bonnes relations. Personnellement, je n’ai pas de problème quelconque avec qui que ce soit au MPP. J’ai choisi un autre chemin politique, d’autres ont choisi de rester au MPP, chacun s’assume en toute responsabilité.

« Le PPS porte depuis sa naissance les germes de la réconciliation » (Lambi Sawadogo) © Faso7

Faso7 : Que pensez-vous de la transition en place au Burkina ?

L.S : Je constate comme tout le monde que la transition se déroule avec beaucoup de volonté des nouvelles autorités. Je note également qu’il y a des difficultés, surtout liées à la résorption de la question sécuritaire. Mais ces difficultés ne sont pas seulement celles des autorités de la transition. Elles incombent à chacun de nous. Je pense qu’ensemble main dans la main, le Burkina Faso sortira victorieux.

Faso7 : Quel avenir vous prédisez pour le Burkina ?

L.S : En tant que Burkinabè, je suis très optimiste pour mon pays. Les Burkinabè sont un peuple travailleur, combattif et résilient, qui ne se résigne devant rien. Nous sommes en train de souffrir le martyr, mais c’est pour moi une épreuve de test de résilience et toutes les grandes nations ont connu des épreuves parfois plus difficiles.

Faso7 : Sur la question de la réconciliation nationale, quelle est votre position ?

L.S : Le PPS porte depuis sa naissance les germes de la réconciliation. Nous demeurons convaincus que le salut du pays passe nécessairement par là et je puis vous réitérer notre profond attachement à cette vision. Cela voudrait dire que nous avons compris le vrai problème du Burkina Faso d’aujourd’hui. Quand des Burkinabè prennent des armes et tirent sur d’autres Burkinabè, c’est notre fondement même qui s’écroule. Nous sommes réputés être le « Pays des hommes intègres » du fait de l’acceptation de l’autre, y compris l’étranger. Aujourd’hui cela est en passe de devenir un rêve, alors qu’il faut impérativement que ce soit une réalité. Nous sommes non seulement favorables pour la réconciliation des Burkinabè, mais surtout prêts à y aller pour que la Nation retrouve son âme.

« La confession est un acte d’humilité et non un acte d’impuissance »

Faso7 : Au nom de la réconciliation, doit-on faire l’impasse sur la justice et la vérité ?

L.S : Non. Absolument pas. La réconciliation reste pour moi un idéal dont l’implémentation ne doit en aucun cas fragiliser les fondements de la nation que sont les institutions. La justice comme les autres institutions de l’Etat sont les instruments de mise en œuvre des politiques à l’image de la réconciliation nationale. Mais entre les vœux et les faits, il y a une distance à parcourir. À l’épreuve des faits, il va falloir concilier l’encrage et le respect des institutions au sacrifice d’intérêt national.

Faso7 : Concrètement, quel peut-être l’apport des anciens dignitaires du régime Compaoré dans la quête de la sécurité ?

L.S : Sur une question aussi préoccupante et primordiale qu’est la sécurité, nul besoin de rappeler que le concours de tous les citoyens est attendu. Je voudrais ici inviter les uns et les autres à travailler à éviter de diviser davantage. Commençons par bannir les expressions telles que, anciens dignitaires du régime Compaoré ou anciens dignitaires du régime Kaboré. On continue de dresser des camps opposés. Ce n’est pas nécessaire de nos jours. Et c’est la raison pour laquelle nous pensons que la vieille classe politique doit se retirer de l’activisme politique et laisser la génération montante.

Faso7 : Quel est votre avis sur la lettre de pardon de Blaise Compaoré?

L.S : Comme mon président a eu à l’exprimer, c’est une démarche hautement symbolique, surtout venant d’un homme de la trame de Blaise Compaoré. Sur la question, nous restons encore une fois de plus, fidèles à notre logique de faire de la réconciliation, le point de départ de notre salut. Mais l’arbre ne doit pas cacher la forêt. II faut un aveu sincère pour un pardon sincère. Le débat soulevé sur la question au sein de l’opinion montre à souhait qu’il y a un problème dans la forme, qui entache certainement le fond. La confession est un acte d’humilité et non un acte d’impuissance. Ça voudrait dire simplement, que si j’ai offensé, je ne dois pas attendre de paraître faible avant de demander pardon.

Faso7 : Sur les accords militaires, le Burkina doit-il laisser tomber la France pour se tourner vers d’autres partenaires comme la Russie ?

L.S : La question n’est pas de laisser tomber ou pas un partenaire. En matière de coopération, il n’y a pas de contingentement par rapport au nombre de partenaires à choisir et on a toujours besoin de tous nos partenaires. Encore que le choix du type de partenaire est un domaine de souveraineté. Nous avons des intérêts en jeu et le partenaire qui satisfait aux intérêts est normalement le bienvenu.

Propos recueillis par Basile SAMA

Faso7

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