Ahmed Sana : «Les Egyptiens sont accueillants surtout envers les Burkinabè»


L’Association des étudiants burkinabè en Egypte a été mise en place le 20 novembre 1960. L’un de ses objectifs est de résoudre les problèmes des Burkinabè vivant en Egypte, et d’inculquer un sens de responsabilité à chaque personne afin qu’elle puisse participer à la construction de la patrie. Le 18 janvier 2023, une équipe de Faso7 en séjour en Egypte a rencontré le Bureau de cette association. Les difficultés rencontrées et leur apport pour l’édification d’un Burkina Faso meilleur ont été des questions abordées avec trois membres de ce Bureau composé de 17 personnes.


Les étudiants burkinabè vivant en Egypte sont évalués à plus de 1000 personnes, a indiqué Ahmed Sana, Superviseur général du Bureau de l’Association des étudiants burkinabè en Egypte, par ailleurs, ressortissant de Dablo (Province du Sanmatenga, Région Centre-Nord au Burkina Faso). Ahmed Sana a commencé à étudier en Égypte en 2013. Et selon lui, « les Egyptiens sont accueillants surtout envers les Burkinabè qui ont un bon comportement et qui sont bien éduqués ».
Pour Ahmed Sana, « dès que ton hôte te reçoit, tu deviens comme un membre de sa famille. Nous rendons grâce à Dieu pour cela. Particulièrement, le Cheick de l’Université Al-Azhar qui est le leader du monde musulman en Egypte. Il prend tout étudiant qui arrive ici sous son aile. Aussi, chaque Etat a ses lois auxquelles il faut se conformer. Tout n’est pas rose, mais le positif domine ». Même si tout semble se passer bien pour les Burkinabè vivant en Egypte, de l’avis d’Abdoulaye Kabré, originaire de Koudougou (Région du Centre-ouest), les étudiants rencontrent certaines difficultés.



« Nous pouvons citer en premier, les difficultés rencontrées lors des inscriptions. Depuis un an, les étudiants burkinabè qui arrivent ici font face à des problèmes pendant les inscriptions à l’Université Al-Azhar » a relaté Abdoulaye Kabré, installé au pays des Pharaons depuis 2013. Cela est dû, selon Abdoulaye Kabré, au fait que le plus souvent, certains Burkinabè qui arrivent en Egypte ont des visas qui ne sont pas dans les normes. De ce fait, l’Université Al-Azhar refuse de valider leur inscription.
« Afin de résoudre ce problème, notre bureau a effectué des démarches auprès des administrations, mais cela n’a toujours pas abouti. Donc, nous allons profiter pour lancer un plaidoyer auprès des autorités politiques et musulmanes du Burkina Faso afin que les étudiants burkinabè qui arrivent ici puissent s’inscrire facilement, puisque c’est l’objet même de leur venue », a plaidé Abdoulaye Kabré.
La deuxième difficulté, selon M. Kabré, est liée aux bourses. L’Université Al-Azhar offrait de nombreuses bourses au Burkina Faso afin que des Burkinabè viennent étudier en Egypte. Mais « depuis près d’un an, on remarque que le nombre des bourses offertes a baissé et c’est seulement une dizaine de personnes qui en ont reçu cette année. Notre souhait est qu’ils augmentent le nombre des bourses offertes pour atténuer la souffrance des étudiants », a indiqué Abdoulaye Kabré. Par ailleurs, selon Ousséni Zango, également membre du Bureau des étudiants, depuis environ 2 ans, pour les étudiants burkinabè, « il est devenu difficile d’obtenir le visa ».



La troisième difficulté, pour Abdoulaye Kabré se situe au niveau de l’enseignement scientifique, « un volet pourtant important pour notre pays », soutient-il. Selon les explications du membre du bureau, les étudiants venus du Burkina Faso ont des difficultés à s’inscrire dans les filières scientifiques, « parce qu’ils n’ont pas les bases ». Partant, à l’endroit des futurs postulants, Abdoulaye Kabré les conseille de « bien suivre » des formations de base liées aux filières scientifiques dans lesquelles ils souhaitent s’inscrire avant de prendre tout vol vers le pays des Pharaons.
Selon l’Association des étudiants burkinabè en Egypte, certains étudiants, de retour au pays, arrivent tant bien que mal à s’intégrer. Pour ceux qui optent de retourner au pays pour chercher du travail à la fin de leur formation, ils sont de deux catégories. Il y en a qui choisissent de travailler dans le public et d’autres dans le privé, a expliqué Abdoulaye Kabré.
« Nous avons un conseil à donner. Lorsque tu comptes travailler pour l’Etat, tu dois choisir une branche qui est en lien avec les besoins de l’Etat, prenons l’exemple de la médecine. Même si la formation scientifique est donnée en langue arabe, il faut noter que la barrière linguistique n’empêche pas de travailler pour l’Etat burkinabè puisqu’il s’agit d’activités purement techniques et non littéraires. Mais chaque étudiant a ses ambitions.
Par exemple, si tu optes pour l’enseignement islamique, ton travail sera lié au bénévolat religieux. On ne peut pas dire que ce n’est pas un travail puisque tu te mets aussi au service du peuple.
Maintenant, la question est de mettre en place des mécanismes afin que les étudiants qui apprennent l’islam puissent mettre leur connaissance au profit de la Nation ».
Abdoulaye Kabré, étudiant en Egypte
Partant, Ahmed Sana a invité les autorités du pays à avoir un regard sur le sort des étudiants arabophones afin de leur permettre d’intégrer plus facilement la Fonction publique et contribuer ainsi « au développement du pays ».
Profitant de l’occasion, Abdoulaye Kabré a appelé ses frères qui étudient l’islam, « à ne pas se laisser manipuler par des esprits mal intentionnés qui vont les amener à utiliser leur connaissance à de mauvais desseins ». Avis partagé par Ahmad Sana. Selon celui-ci, certaines personnes ont une mauvaise compréhension des enseignements islamiques. L’islam n’est pas une religion que l’on impose, a détaillé M. Sana. « Concernant ceux qui attaquent les non-musulmans, il faut dire qu’ils ont une compréhension erronée de la religion, parce que Dieu n’enseigne pas que l’on oblige autrui à intégrer la religion islamique », a tranché Ahmad Sana.



– © Faso7
Même étant loin de leur patrie, les Burkinabè vivant en Egypte ont le « Pays des Hommes intègres » dans leur cœur. La situation marquée par des attaques terroristes, dans laquelle le pays est plongé depuis près de 10 ans les préoccupe. « Pour sortir de cette situation, nous avons intérêt à être unis et demander l’accompagnement de Dieu. Mais si nous sommes divisés, nous n’y arriverons pas. Avec les contradictions d’idées liées à l’individualisme, il sera difficile de parvenir au résultat souhaité. Il est impératif que nous soyons unis pour sortir le pays de l’ornière » a clamé Ousséni Zango.
Cet étudiant appelle ainsi les Burkinabè à rester souder derrière les autorités du pays afin que la paix revienne. Car, dit-il, « pour nous qui sommes venus étudier en Egypte, ce serait déplorable de retourner trouver un pays détruit ».
Avant même que l’appel ne soit lancé, nos yeux étaient déjà rivés sur le Burkina Faso
Sur l’appel des autorités de la Transition, notamment, le Capitaine Ibrahim Traoré, pour un élan de solidarité, Abdoulaye Kabré a indiqué que le message leur est parvenu par l’entremise de l’ambassadeur du Burkina Faso en Egypte qui a publié une lettre à l’endroit de tous les Burkinabè.
« Notre association en a eu copie et tous les Burkinabè qui sont ici s’activent à répondre à l’appel du Président. Avant même que l’appel ne soit lancé, nos yeux étaient déjà rivés sur le Burkina Faso et nos cœurs y sont aussi. Tout un chacun aide déjà à sa manière au pays, mais maintenant que c’est le Président qui lance l’appel, nous allons nous réunir pour agir à travers l’ambassade. C’est le mot d’ordre de la communauté burkinabè vivant en Egypte », a fait savoir Abdoulaye Kabré.
Ignace Ismaël NABOLE
Faso7