Burkina Faso : Le diagnostic du Ministère en charge de l’agriculture et de la FAO pour une meilleure productivité

Le Ministère de l’Agriculture et des Aménagements Hydro-agricoles et mécanisation (MAAH) et la FAO ont identifié les investissements prioritaires permettant d’accélérer la transformation structurelle du secteur agricole. Les deux institutions, ont travaillé en étroite collaboration pour produire le rapport intitulé « Priorisation des investissements pour la transformation agricole au Burkina Faso » et récemment publié.

Le rapport se concentre sur les cultures considérées comme prioritaires dans le programme national du secteur rural (PNSR). Il s’agit notamment du maïs, du riz, du mil, du sorgho, du sésame et du niébé.

 « L’agriculture au Burkina Faso est dominée par les céréales qui couvrent plus de 64% des superficies cultivée. Les céréales constituent la principale source de consommation des populations. Outre leur accessibilité, elles ont un potentiel énergétique très élevé permettant de combler la carence énergétique dans l’alimentation des populations », selon le MAAH Salifou Ouédraogo.

Étant donné l’importance de l’agriculture dans le processus de développement économique, la lutte contre la pauvreté et l’amélioration de la sécurité alimentaire, les chefs d’Etats africains avaient pris l’engagement en 2003 à Maputo de consacrer à l’agriculture, 10% de leur budget national. Plus de 10 ans après cet engagement appelé « engagement de Maputo », le Burkina Faso peine à le respecter.

Selon le MAAH, Salifou Ouédraogo, « L’accroissement de la productivité est le premier niveau de la transformation agricole. Elle permet à court terme une meilleure maitrise de la production agricole. A long terme, elle permettra de libérer la main d’œuvre du maillon production pour les rediriger vers les maillons commercialisation et transformation afin de développer ces maillons. L’augmentation de la productivité contribue à réduire les prix des produits agricoles et permettra aux unités de transformation d’offrir des produits compétitifs par rapport à ceux importés ».

C’est dans cette optique que le MAAH, à travers la Direction générale des études et des statistiques sectorielles (DGESS) a sollicité et obtenu le soutien du programme de suivi et analyse politiques agricoles et alimentaires (SAPAA) qui est mis en œuvre par l’organisation des nations unies pour l’alimentation et l’Agriculture (FAO)

BREF APERÇU SUR L’AGRICULTURE BURKINABE

Les cultures céréalières sont les cultures prioritaires au Burkina Faso.

Ce sont les cultures les plus pratiquées par les populations (plus de 65% des superficies cultivée).

Production 2019: 4 939 630 tonnes.

Superficie 2019: 4 272 786 ha.

                                                                              Production 2020: 5 179 000 tonnes.

                                                                                 Superficie 2020: 4 091 786 ha.

Elles sont la base de consommation des populations (tô, riz, bouillie, dolo).

En termes de production, le sorgho vient en tête, suivi du maïs, du mil et du riz.

4 personnes sur 5 travaillent dans le secteur agricole.

L’agriculture demeure la source d’alimentation et de revenu par excellence.

L’accroissement de la productivité est la première phase de la transformation de l’agriculture.

L’étude menée par la DGESS et le SAPAA présente plusieurs options de dépenses publiques que le gouvernement du Burkina Faso pourrait envisager et compare l’impact de ces différentes options sur les rendements agricoles, la valeur ajoutée agricole, les revenus des ménages et le taux de commercialisation.

Selon les résultats de l’étude, les rendements varient selon les options de dépenses publiques et selon les produits. L’étude estime que lorsqu’une augmentation des dépenses publiques privilégie l’irrigation de périmètre, elle permet l’augmentation du rendement du maïs tandis que les effets sont moindres sur les rendements des autres cultures. D’autre part, lorsque cette hausse des dépenses publiques est répartie de manière équilibrée entre l’irrigation de périmètre, les subventions aux intrants, la vulgarisation agricole et la mécanisation agricole, les effets positifs se font plus ressentir au niveau des rendements du riz alors qu’une augmentation des dépenses publiques orientée plus vers les services de vulgarisation agricoles aura un impact positif sur le maïs, le riz, et d’autres cultures.

Par ailleurs, lorsque les dépenses publiques sont orientées vers les services de vulgarisation agricole, l’impact positif sur « la valeur ajoutée agricole et sur les revenus des ruraux » est relativement plus marquées. Cet effet découle des bénéfices de la vulgarisation agricoles sur les rendements de mil et de sorgho, qui constituent une source importante « de revenus et de calories pour les ménages ruraux ».

Les recommandations pour atteindre les objectifs

La première recommandation est d’augmenter le niveau des dépenses publiques vers l’agriculture afin de pouvoir respecter l’engagement pris à Maputo, à savoir consacrer 10% des dépenses publiques à l’agriculture. Si le Burkina Faso alloue ces ressources additionnelles de manière stratégique, il pourrait espérer une augmentation des rendements du maïs et du riz de 36 et 40%, respectivement. Quant à la valeur ajoutée agricole, elle pourrait s’accroître jusqu’à près de 10% et les revenus des ménages en situation de pauvreté pourraient également s’améliorer.

Néanmoins, une simple augmentation des investissements à elle seule, ne suffira pas à développer l’agriculture burkinabè et lutter contre la faim. Il est recommandé au Burkina Faso de diversifier ses investissements et de « suivre une stratégie multi-investissement » qui va consister pour le pays de prendre en compte non seulement le maïs et le riz dans ses investissements mais aussi de prendre en compte les autres cultures comme le mil, le sorgho, le niébé et le sésame. Cette approche diversifiée est la plus à même d’accroître les revenus des ménages ruraux, indique le rapport.

Même si le fait d’orienter les dépenses publiques vers les semences, les engrais, l’irrigation, la vulgarisation et la mécanisation favorise la commercialisation des cultures dans le pays, particulièrement pour le maïs et le riz, force est de reconnaître que pour atteindre les objectifs nationaux en matière de productivité, il en faut plus.

« Si les dépenses publiques augmentaient pour atteindre la cible de 10%, et si elles étaient allouées de manière stratégique, le pays pourrait cueillir les fruits d’une production plus efficace et de meilleurs rendements de maïs et de riz, produits qui sont à la base de l’alimentation des Burkinabè. Le pays verrait également une augmentation des revenus des ménages ruraux et une hausse de la valeur ajoutée agricole, une des clés de la création d’emplois au Burkina Faso », précise M. Christian DERLAGEN, Économiste senior et Chef du projet SAPAA à la FAO

Notamment, en matière de mécanisation, le gouvernement a par exemple depuis 2017 fourni 900 tracteurs et autres équipements agricoles à un prix subventionné. Ceci fait écho au Plan national de développement économique et social 2016-2020 (PNDES) qui a reconnu la mécanisation comme un élément essentiel de la modernisation de l’agriculture.

Enfin, la mise en place de « nouvelles interventions » devra inciter la participation au marché et la dynamisation de l’aval. Il s’agit concrètement de la construction des infrastructures de soutien comme les routes, les marchés et les installations de stockage. Cette solution doit être accompagnée par une facilitation dans l’accessibilité des « services financiers ».

Afin d’utiliser pleinement son potentiel agricole, le Burkina Faso doit augmenter le niveau de ses dépenses agricoles mais aussi les allouer de manières stratégiques à la fois entre les programmes budgétaires et entre les cultures. Cette approche favoriserait la transition d’une agriculture de subsistance à une agriculture orientée vers le marché et placerait donc les agriculteurs et les populations rurales au cœur de la transformation économique du pays.

« Ce que montre notre rapport, c’est qu’un investissement soutenu et ciblé peut jouer un rôle de catalyseur pour assurer la sécurité alimentaire, accélérer la transformation agricole au Burkina Faso, et orienter le secteur vers plus de commercialisation et d’ajout de valeur » ajoute M. DERLAGEN de la FAO.

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