Miss Tanya : « La musique, c’est mon entreprise »

Certaines personnes arrivent à renaitre de leurs cendres et briller jusqu’à ce que leur lumière fasse disparaitre les cicatrices d’une vie antérieure tumultueuse. Parmi ces personnes, Miss Tanya pourrait être citée comme un exemple. De son vrai nom Bikienga Douti Tanya, Miss Tanya est originaire du Gulmu. Découverte en 2018 par les mélomanes burkinabè avec son single « Dodo », la jeune artiste est devenue incontournable dans la sphère musicale burkinabè. Electrique sur scène et travailleuse acharnée, elle a réussi en 02 ans à inscrire un nom féminin dans l’afrobeat au Burkina Faso. Toujours souriante, on est loin de s’imaginer que la belle et ravissante artiste a surmonté d’énormes difficultés avant d’être aujourd’hui un rêve pour de nombreuse jeunes filles. C’est à cœur ouvert qu’elle a accepté de parler à une équipe de Faso7 le 29 décembre 2020. Lisez pour vous faire une idée sur la capacité de résilience de la jeune artiste. Lisez pour comprendre qu’on ne nait pas toujours avec le sourire aux lèvres. Certaines personnes comme Miss Tanya le fabrique au fil des années.

Faso7 (F.7) : Comment miss Tanya est arrivée dans la musique ?

Miss Tanya (M.T) : Au départ, je n’envisageais pas de devenir artiste. Je dirais même que je fuyais la musique. Et après, je me suis dite qu’il va falloir que je la fasse du moment que je faisais de petites prestations. Il ne faut pas fuir la réalité. Dans la société, on dit surtout que quand tu es fille, c’est mal vue, la musique. C’est ce qui faisais que j’avais peur mais après, je me suis dite que je vis pour moi. Je ne vis pas pour les gens. Je ne vis pas pour ce que les gens pensent. Et en fin de compte, c’est mon bonheur. C’est là que j’ai décidé de prendre la musique en main.

F.7 : Miss Tanya continue-t-elle ses études en chantant ?

M.T : J’ai fini les études. J’ai fait la maitrise en Marketing et communication.

F.7 : Comment es-tu arrivée à imposer ton style, l’afro pop ou l’afro beat, dans un univers dominé par la musique locale ?

M.T : Justement c’est parce que la musique au Burkina Faso était dominée par la musique locale, que j’ai jugé bon d’introduire l’afrobeat. Il suffisait seulement d’avoir une intelligence musicale pour pouvoir vite conduire les esprits vers moi.

Je me suis dite que la musique est universelle. Si on n’écoute pas l’afrobeat au Burkina Faso et on l’écoute à l’extérieur, à travers des artistes comme Daphné, chanel etc., c’est qu’on peut aussi nous écouter.  Comment faire pour qu’on nous écoute ? Il fallait donc réfléchir et voir comment dorénavant bien préparer les choses et puis servir.

F.7 : Quelle est ta source d’inspiration ?

M.T : Ma source d’inspiration vient de mon vécu. C’est vrai que les gens voient Miss Tanya comme une petite fille, on me donne 15 ans même (rires), et ça me fait plaisir. On voit une personne joyeuse tout le temps mais j’ai eu un vécu pas possible. Et ma source d’inspiration me vient de là, de mon environnement, du quotidien, de mes camarades et tout.

F.7 : Qu’est ce qui te fait dire que tu as eu un vécu difficile ?

M.T : Miss Tanya vient vraiment de très loin. J’ai grandi à la frontière entre trois cultures à savoir la culture burkinabè car mes parents sont des gourmantchés de Fada, la culture togolaise et la culture ghanéenne. Mes parents sont venus à Sinkansé pour le commerce. Une famille très modeste d’ailleurs. J’étais très proche de mon papa, par contre ma relation avec ma mère était un peu difficile. Et puis après j’ai perdu mon père très très jeune.

Mon vécu avec mon papa, l’éducation, le coaching, n’a pas été facile également. C’est-à-dire, on te prend, on t’injecte l’éducation de gré ou de force. Moi je n’avais presque pas de congés. Je n’avais presque pas de vacances, parce que j’allais au Ghana pour continuer les cours d’anglais pendant que mes camarades s’amusaient. Je n’avais pas droit à m’amuser. Je n’avais pas droit à regarder la télé. J’étais là avec les bouquins tout le temps. J’étais un enfant triste. Mon père voulait que je sois une personne tellement forte, une personne parfaite si bien que l’éducation était très dure.

Et quand il est décédé ce fut un autre coup. Il fallait maintenant affronter la vie en étant tout seule. Etant fille, avec l’éducation que j’ai reçue, ça n’a pas été facile. J’ai dû vivre des cauchemars jusqu’à terminer mon université et travailler pour être là où je suis aujourd’hui.

F.7 : Tu évoques beaucoup l’amour et la solidarité dans tes chansons, est-ce que c’est lié à une histoire personnelle ?

M.T : De nature, j’aime beaucoup rependre l’amour partout où je suis, raison pour laquelle j’aime chanter l’amour. Pour moi, si tout le monde pouvait s’aimer et ne pas se détester, ce serait bien (rires). Pour moi, c’est l’amour pour tous, Dieu même l’a dit, « aime ton prochain comme toi-même « .

F.7 : De nos jours, les femmes dans le showbiz sont mal vues, quel est ton point de vue sur ce sujet ?

M.T : Justement c’est pour ça même que je suis artiste. Au départ, je me disais qu’on va dire que tu es artiste fille, tu ne vas pas te marier, tu vas te taper beaucoup de mecs. Justement quand j’ai commencé, Il y a beaucoup de mecs qui voulaient taper (rires), mais on vient dans la musique, chacun avec son objectif. De la manière dont tu prends ton boulot, c’est comme ça ton boulot te revient. Si tu prends ton boulot au hasard, dans la pagaille, c’est comme ça que ton boulot te revient. Et chaque artiste a un objectif, pour l’atteinte duquel, l’artiste fixe certaines limites dans son comportement. Il y a des choses à éviter parce que tu as un objectif pour lequel tu dois t’affranchir.

Il y a d’autres qui ne viennent pas pour faire la musique mais pour se faire voir. Ça dépend des objectifs que chacun se fixe.

F.7 :  Comment arrives-tu à résister aux avances des hommes ?

M.T : Je pense que les mecs, c’est lorsque tu leur prête le flanc, qu’ils te draguent. Quand ils viennent, à travers ton comportement, ils savent si tu es une personne qui n’est pas là pour se faire draguer mais pour travailler. Malgré ça, il y a toujours certains qui vont vouloir insister mais je remets à l’ordre poliment parce que c’est mon travail d’abord.

F.7 : Tu ressens quoi face à ton public lors d’un concert ?

M.T : C’est le moment même où je vis. Je me rappelle lorsque j’étais plus jeune, dans ma chambre avec ma télécommande en main, essayant de faire le micro. Lorsque je monte sur scène aujourd’hui et que je vois la réalité en face, les gens qui crient de joie de me voir, ça me fait énormément plaisir. C’est inexplicable.

F.7 : Pourquoi avoir choisi de composer avec un staff jeune ?

M.T : Mon staff, on s’est croisé par hasard. Par exemple l’arrangeur, je l’ai connu quand on était à l’université et ça fait déjà six ans qu’on travaille ensemble. C’est pareil pour le réalisateur et le manageur.

F.7 : Quelle est ta stratégie pour faire marcher ta carrière ? Ton image ?

M.T : Je mise sur beaucoup de choses. Je mise sur mon image, la qualité de ma musique, de mon clip, sur la qualité vestimentaire. En somme, sur beaucoup de choses.

Cela me désole de voir qu’on suit le cursus musical ivoirien qui est en train même de dégringoler.  On suit ce cursus de buzz alors que nous sommes des artistes avec des objectifs et des visions. Lorsqu’on veut aller loin, il y a des choses qu’il ne faut pas faire pour le sacrifice de son travail.

La musique, c’est mon entreprise et dans mon entreprise, je ne peux pas m’habiller n’importe comment, venir s’assoir en tant que PDG.

Il faut qu’il y ait de l’ordre dans notre entreprise. Il faut qu’on ait des stratégies dans notre entreprise, pour que ça puisse aller de l’avant.

F.7 : Comment tu qualifies ton bilan de l’année 2020 ?

M.T : Je rends grâce à Dieu seulement. J’ai presque deux ans de carrière mais il y a des artistes qui, en cinq ans de carrière n’ont pas eu ce que j’ai eu. Je ne sais pas pourquoi le choix est porté sur moi. Je ne peux que rendre grâce à Dieu.

F.7 : Quels sont tes projets pour la nouvelle année ?

M.T : Pour l’année 2021, que Dieu me fasse grâce d’un album, parce que je n’ai pas encore d’album. Je n’ai que 4 singles sur le marché à savoir « Dodo », « N’dolé », « Ma Bague d’abord » et « My lover ». Je souhaite donc faire un album en 2021. J’ai aussi d’autres projets de featuring. Insh’llah si Dieu le permet.

F.7 : Le clip « MY LOVER » a couté combien ?

M.T : Ah ça (rires). Je donne une fourchette, entre un et deux millions de FCFA.

F.7 : Quel est ton plus grand rêve ?

M.T : Mon plus grand rêve, c’est de m’assoir un jour comme ça et voir qu’il y a un ou une artiste burkinabè qui est adulé (e) à l’international et qui descend par exemple en Côte d’Ivoire et que le public ivorien sort massivement l’accueillir en grande Star. Oui, c’est mon rêve. Qu’une star africaine soit aussi Burkinabè.

Découvrez dans la vidéo ce qu’elle a dû faire pour lancer sa carrière?

Propos recueillis par Mariam Nignan

Faso7

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