Adja de Komsilga : « Ma mission, c’est de soigner et non d’agresser »


Interpellée avec huit de ses collaborateurs suite à la diffusion d’une vidéo sur les réseaux sociaux le 26 juillet 2023 montrant des individus en train de torturer un quinquagénaire, Hamidou Kanazoé, Larissa Nikiéma dite Adja était à la barre pour être jugée ce mercredi 6 septembre 2023 au tribunal de grande instance Ouaga II, après deux reports.
Poursuivie pour avoir incité l’arrestation, la séquestration et la bastonnade de Hamidou Kanazoé, à Rakissé le 24 juillet 2023, Adja ne reconnaît pas les faits qui lui sont reprochés. Pour sa défense, la guérisseuse dit n’avoir été informée de la bastonnade de la victime que le lendemain des faits.
Selon elle, lorsque ses employés lui ont présenté la victime, ce dernier lui aurait tendu un billet de 5 000 F CFA en lui demandant de lui accorder des soins car souffrant de troubles mentaux. Elle dit avoir demandé à ses employés de conduire la victime au niveau des autres malades, en attendant qu’elle finisse de s’occuper de certains malades.
« Dans la nuit, c’est mon papa qui m’a informée que le monsieur a été bastonné par les jeunes. Le lendemain, lorsque ces derniers sont venus sur le site, je leur ai dit de quitter mon site et que je ne veux plus travailler avec eux. Je leur ai expliqué que si quelque chose arrivait au monsieur, l’on pourrait facilement me pointer du doigt. C’est ainsi que je les ai remerciés. J’ai donc demandé à mon papa d’aller présenter des excuses à la famille de Kanazoé. Je ne savais même pas qu’ils avaient frappé cet homme et filmé la bastonnade pour ensuite mettre sur les réseaux sociaux. Cette histoire me fatigue énormément. Croyez-moi. Tout ce que je peux, c’est demander pardon au procureur et à tout le monde. Ma mission, c’est de soigner et non d’agresser », a-t-elle soutenu.
Un argumentaire auquel le parquet ne croit pas. En effet, le ministère public dit avoir à sa possession, un enregistrement dans lequel la guérisseuse reconnaît avoir donné l’ordre à ses employés de bastonner la victime.
Dans ses réquisitions, il a demandé que la guérisseuse soit déclarée coupable et condamnée à 2 ans d’emprisonnement dont 1 an ferme avec une amende de 3 millions ferme.
Les coprévenus, notamment les employés de Adja, au nombre de huit, sont poursuivis pour des faits de séquestration et de bastonnade. Face au juge, ils ont tous plaidé coupable. Contre ces derniers, le ministère public a requis une peine d’emprisonnement de 2 ans ferme avec une amende de 500 000 F CFA ferme.
Contre Saïouba Rouamba poursuivi pour des faits de séquestration, de bastonnade et d’atteinte à la vie privée de la victime, le procureur a requis une peine d’emprisonnement de 3 ans dont 2 ans fermes et une amende 500 000 F CFA ferme.
Selon Barry Adama, l’un des prévenus, la victime, Hamidou Kanazoé a été aperçue au niveau d’un marigot aux environs du site de la guérisseuse. L’accès au marigot est conditionné à une autorisation préalable de la guérisseuse. Hamidou Kanazoé n’avait pas obtenu cette autorisation. C’est la raison pour laquelle il a été appréhendé et présenté à la guérisseuse.
« Elle nous a instruits de le faire patienter à l’espace des soins (situé à environ 6 km du marigot, selon lui) en attendant qu’elle vienne. Au lieu de l’envoyer au lieu indiqué, nous sommes repartis avec lui au marigot. Ensuite, nous avons pris l’initiative de lui demander ce qui l’a amené au marigot. Face à son refus de répondre, nous avons décidé de l’enchaîner et de le tabasser pour le contraindre à répondre », a-t-il déclaré tout en s’excusant pour les 3 coups de fouet qu’il a administrés à la victime.
Dans le récit des faits de l’ensemble des prévenus, il ressort que leur patronne, la guérisseuse, n’était pas au courant du traitement qu’a subi la victime. Elle n’en a pas donné l’ordre. Et lorsqu’elle l’a su, elle a décidé de mettre fin à leur collaboration.
« C’est le lendemain (…) que nous avons informé Adja, lorsqu’elle est revenue sur l’espace des soins. Elle nous a grondés et nous a dit d’enlever nos tenues de travail parce que nous voulions gâter son activité », a soutenu Sambo Kouanda, l’un des accusés.
A noter que la victime dans cette affaire, notamment Hamidou Kanazoé, a refusé de se constituer comme partie civile, compte tenu de la déclaration de pardon faite par les deux familles.