Capitaine Ibrahim Traoré : L’actionnariat populaire, « une nouvelle page de notre histoire »


A l’occasion du lancement du programme de l’entreprenariat communautaire par l’actionnariat populaire, le Chef de l’Etat, le Capitaine Ibrahim Traoré, a lancé un appel à tous les Burkinabè à une souscription massive afin « de prendre en compte le destin » du Burkina Faso. Nous vous proposons un large extrait de son discours.
« (…) Ce matin, nous sommes réunis pour écrire une nouvelle page de notre histoire.
Nous avions été conseillés, mais nous n’avons pas écouté. D’autres ont osé, nous ne les avons pas accompagnés. Nous relançons encore la machine cette fois-ci.
Nous avons constaté que le modèle économique qui nous a été imposé depuis quelques décennies, ne produit pas de fruits. Nous avons pensé qu’on ne peut pas nous imposer une manière de nous développer.
« Nous prenons des prêts pour rembourser des prêts »
Nos pays ont passé le temps à s’endetter et (sans) jamais pouvoir se financer pour investir dans des domaines clés, au point qu’aujourd’hui nous prenons des prêts pour rembourser des prêts.
Comment est-ce qu’on peut se développer dans ce contexte ? Et c’est normal que ces institutions qui nous prêtent de l’argent ne veuillent ou ne souhaitent pas que nous puissions nous en sortir. Si je vous prête de l’argent, moyennant des intérêts, il est normal que je mette tous les moyens pour que cet argent ne vous serve pas à vous départir de moi. Et donc ça pose un problème.
Comment est-ce que nous pouvons avoir autant de bas-fonds et que nous continuons par exemple d’importer le riz ? Comment est-ce que nous pouvons produire de la tomate que des gens viennent payer à vil prix, et encore nous réimportons de la pâte de tomate ? Comment est-ce que nous pouvons produire des produits tel que le soja, le sésame, nous les exportons et nous réimportons l’huile ?
Ce système, que nous qualifierons d’impérialiste, ne fait qu’enrichir la petite minorité que nous appelons la bourgeoisie et appauvrir les masses populaires. Il y a donc un déséquilibre.
Un déséquilibre qui nous a conduits petit à petit vers ce que nous savons, le terrorisme, phénomène créé et inventé, mais qui a connu l’adhésion d’une bonne partie de Burkinabè parce que n’ayant pas le choix du fait de la pauvreté, ils se sont engagés.
Contre le terrorisme
Nous pensons que cette nouvelle page qui s’inscrit et qui est en train de s’écrire ce matin, doit pouvoir remédier à beaucoup de problèmes que nous connaissons, que ce soit l’emploi des jeunes et même ce phénomène de terrorisme.
(…) Les devanciers (…) tel que Joseph Ki-Zerbo, Cheick Anta Diop ou Souleymane Soulama, ont tous prôné ce que nous appelons le développement endogène et inclusif. Mais, nous n’avons pas peut-être compris le sens de tout ce qu’ils nous disaient. Mais plus tard le Président feu Capitaine Thomas Sankara nous avait dit d’oser inventer l’avenir. Nous n’avons peut-être pas compris le message en son temps, il a encore ajouté : ‘produisons ce dont nous avons besoin, transformons cela et consommons ce que nous produisons’.
Nous pensons que nous avons cette capacité. Et comment y arriver ? Nous n’allons pas y arriver avec un système qui nous est imposé. Il fallait donc créer, il fallait inventer.
Le « tercérisme » de Laurent Bado …
En lisant, nous avons aussi vu dans le programme politique d’un éminent homme politique qui est ici présent dans la salle, j’ai nommé le Pr Laurent Bado, qui a passé son temps à nous rappeler qu’il fallait que nous fassions du développement endogène le levier de notre socle économique.
Nous avons décidé de mettre en pratique tout ce que nos devanciers nous avaient conseillé et que nous n’avons pas voulu peut-être écouter ou comprendre.
Voilà pourquoi en février, nous avons décidé de créer l’Agence pour la promotion de l’entreprenariat communautaire (APEC). Et le travail de cette agence doit rejoindre un travail que le ministère de la jeunesse et de l’emploi est en train aussi de développer. (…) Nous avons lancé ces derniers temps à Fada les bureaux qui doivent s’installer dans les universités pour essayer de recanaliser les étudiants vers la formation pour l’emploi.
Appel à tous les Burkinabè
Ici, ce matin, nous sommes là pour lancer un appel à tous les Burkinabè, qu’ils soient sur le territoire ou de la diaspora, pour souscrire massivement à ce projet, parce que l’avenir du Burkina, ne rêvons pas, ne viendra pas d’ailleurs. C’est nous qui devons l’inventer, le créer, l’entretenir, nous l’approprier.
J’invite tout le monde à souscrire massivement, à nous permettre de créer nos entreprises, à nous approprier nos entreprises, et d’ailleurs je pense que c’est à cela que nous allons mieux les entretenir. Et qui d’autre pourra travailler dans ces entreprises que nous-mêmes ?
(…) Il faut canaliser les gens vers l’emploi professionnel. Ces entreprises, ces usines, cette mécanisation de l’agriculture, il n’y a pas mieux que nous qui pouvons nous former à certains domaines bien précis pour entretenir tout ce qu’il y aura comme machinerie pour produire tout ce dont nous avons besoin et pour travailler dans ces entreprises.
Voilà pourquoi ces deux doivent marcher ensemble, le projet du ministère de la jeunesse et l’APEC.
L’APEC a fait appel à une société coopérative, qui a fait ses preuves, qui a une bonne expérience dans le domaine et avec qui nous avons échangé pour qu’elle puisse accompagner et soutenir dans un élan patriotique pour que le Burkina Faso puisse passer à un nouveau modèle économique.
Par-dessous tout, cette initiative est un levier pour lutter contre le terrorisme. Parce que tant que les jeunes ne seront pas employés, tant qu’ils seront désœuvrés, ils seront soumis à toute tentation. Tentation d’aller vers la facilité, de chercher d’autres solutions, et ça peut entraîner le grand banditisme et le terrorisme que nous connaissons.
Employer le maximum de jeunes
Il s’agit pour nous de pouvoir employer le maximum de jeunes dans la production, dans la transformation et dans la commercialisation (…). Les domaines choisis sont assez illustratifs. Il s’agit de produire, de transformer certaines matières, d’exploiter nos ressources par nous-mêmes. Parce que cette jeunesse est vaillante.
Lorsque nous faisons un tour sur les sites artisanaux, on les voit plonger dans les profondeurs de la terre, sans équipement de sécurité (…), à la recherche de l’or. Nous pensons que nous pouvons mécaniser le domaine, donner un peu d’amélioration et pouvoir produire notre or nous-mêmes.
S’ils le font déjà avec assez de courage, assez de témérité, il va de soi que nous développons des entreprises semi-mécanisées pour les accompagner et que le Burkina ne soit pas seulement cette terre où des entreprises étrangères viennent piller nos ressources et repartir sans que nous puissions en faire bénéficier à nos populations.
Lire ➡️ Burkina Faso : Le Programme de l’entrepreneuriat communautaire par actionnariat populaire lancé
Ces quelques explications pour montrer à tous ceux qui sont peut-être hésitants, ou ceux qui n’ont pas compris, (…) que nous allons prendre en compte notre destin (…) et nous allons évoluer vers un avenir radieux.
Et je compte sur tous les Burkinabè de l’intérieur comme de l’extérieur pour une souscription massive pour qu’avant la fin de l’année poussent de terre de nouvelles usines, de nouvelles entreprises au profit de tous les Burkinabè. La patrie ou la mort, nous vaincrons ! »
Capitaine Ibrahim Traoré
Président de la Transition
12 juin 2023