Rentrée académique 2022-2023 : Le message de l’ANEB Koudougou

Ceci est une déclaration de la section Koudougou de l’Union nationale des étudiants burkinabè (ANEB), à l’occasion de la rentrée académique 2022-2023.

Le 03 octobre 2022, les activités académiques et pédagogiques ont repris à l’Université Norbert ZONGO (UNZ). L’ANEB Koudougou souhaite une bonne rentrée académique 2022-2023 à tous les acteurs de la communauté universitaire. Elle félicite l’ensemble des étudiants (es) qui ont validé leurs différents semestres en dépit des conditions de vie et d’étude exécrables et souhaite un bon courage à ceux qui sont en cours d’achèvement. Quant aux nouveaux bacheliers orientés à l’UNZ, l’ANEB leur adresse ses vives félicitations pour leur succès et leur souhaite la bienvenue.

Camarades étudiantes et étudiants,

Cette année académique 2022-2023, à l’image de la précédente, s’effectue dans un contexte national très trouble et complexe. Il est marqué par des coups d’Etat militaires à répétition d’éléments de l’armée regroupés au sein du mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR), l’exacerbation de la crise sécuritaire qui culmine actuellement en une guerre civile réactionnaire et  l’incapacité des dirigeants successifs à apporter des solutions aux justes préoccupations des masses populaires (éducation, vie chère, chômage, famine, logement, etc.) La situation de la crise sécuritaire occasionne plusieurs massacres des populations causant de milliers de morts et de blessés, la fermeture des services sociaux de base, l’augmentation exponentielle du nombre de personnes déplacées internes, la perte d’importantes portions du territoire (plus 60% du territoire national hors du contrôle de l’Etat central et ses démembrements.)

Le contexte est marqué également par les luttes multiples et multiformes des populations en général et de la jeunesse en particulier sur l’ensemble du territoire. Ces différentes positions sur les barricades de la lutte traduisent la soif d’un changement qualitatif en leur faveur. Ces différentes luttes de notre peuple et de sa jeunesse ont contraint le pouvoir putschiste du MPSR à programmer et tenir le procès sur l’assassinat de notre camarade DABO Boukary (étudiant en septième année de médecine aux moments des faits) assassiné en mai 1990. Le tribunal a condamné YOUGBARE Magloire Victor à une peine de prison de 30 ans ferme plus une amende de cinq millions de francs CFA, Gilbert DIENDERE à une peine de prison de 20 ans ferme plus une amende d’un million de francs CFA et Bamba Mamadou à une peine de prison de 10 ans ferme plus une amende d’un million francs CFA. C’est le lieu ici pour l’ANEB Koudougou, de féliciter l’ensemble des générations passées d’étudiants et celles actuelles pour leur constance et leur endurance dans la lutte à travers l’UGEB pour cette victoire d’étape 32 ans après ce crime odieux.

Camarades étudiantes et étudiants,

La situation dans nos universités publiques en général et à l’Université Norbert ZONGO en particulier reste marquée par une crise jamais égalée. Cette crise se caractérise par l’accentuation des difficultés aussi bien au plan académique, pédagogique, social, qu’au plan des libertés.

Sur le plan académique et pédagogique, l’UNZ sombre d’année en année dans un retard indescriptible lié à l’application mécanique du système Licence-Master-Doctorat. Par exemple, à l’UFR LSH, ST et SEG, quatre années académiques se chevauchent, 2018-2019, 2019-2020, 2020-2021, 2021-2022. Les bacheliers de 2022 frappent la porte d’entrée de l’Université pendant que leurs aînés n’ont jusque-là composé aucune évaluation de la première année comme c’est le cas dans les promotions Lettres modernes, philosophie, histoire et archéologie, géographie, etc. L’UNZ s’illustre négativement en matière des taux d’échec et d’abandons universitaires. A titre d’exemple, la promotion 2019 de SEG a enregistré 241 admis sur 1441 étudiants en session normale du semestre 3, soit un taux d’échec de 83,3%. En MPCI L1/S1, on note 264 admis sur 1275 étudiants en session de rattrapage, soit un taux d’échec de 79,03% et pour la session normale S2 on note 47 admis sur 1924 étudiants soit un taux d’échecs de 97,56%.

L’application du nouveau régime des études, nouvelle variante du LMD s’avère être un instrument de répression académique (suppression de la double inscription, renvoie en cas de redoublement en 1re année à l’IUT, etc.) Son application donne lieu à des interprétations et abus divers. C’est dans ce registre qu’en Master I de Mathématiques fondamentales, des étudiants ayant obtenu la moyenne générale de 11/20 se sont vu ajournés et les moins chanceux exclus de l’Université au motif d’avoir obtenu une note inférieure ou égale à 07/20 dans une évaluation. Quant aux masters, ils demeurent inaccessibles aux enfants du peuple du fait des conditions ultra-sélectives imposées (frais de formation exorbitants, contingentement, moyenne, etc.) laissant ainsi le rêve et l’ambition de plusieurs étudiants se dissiper.

Au plan infrastructurel, le constat est amer. L’UNZ continue de louer à coût de millions de francs FCFA les locaux inadaptés et mal équipés de la SAP Olympique, de la salle polyvalente et de l’aumônerie scolaire pour l’exécution des enseignements. L’insuffisance des infrastructures et le désordre dans la gouvernance administrative entrainent parfois la programmation de deux promotions différentes dans la même salle et aux mêmes heures. Cette situation expose les étudiants à un risque d’affrontements pour l’occupation des salles de cours.

Au plan social, la clochardisation des étudiants a atteint son paroxysme. Le logement n’est accessible qu’à une minorité d’étudiants. Moins de 02% des étudiants sont logés en résidence universitaire. La majeure partie des étudiants est laissée à la merci des bailleurs véreux qui spéculent sur le loyer selon leur bon vouloir.

Concernant les restaurants universitaires, la situation s’est davantage aggravée avec la digitalisation en plus de l’insuffisance du nombre de plats. Seulement 8.666 plats sont servis de façon journalière (diner et déjeuné) pour plus de 60.000 étudiants soit un plat pour sept (07) étudiants par jour. Cette insuffisance du nombre de plats est à l’origine des cas récurrents d’évanouissements et des pertes en vies humaines dans nos restaurants universitaires. Le cas dramatique de l’étudiant TANKOANO Tenipaguiba, qui a perdu la vie le 17 mai 2022 dans les locaux du restaurant universitaire GEGA, est assez illustratif.  Pendant ce temps, le compte rendu de la rencontre du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (MESRI) avec les Présidents et responsables des institutions d’enseignement supérieur et de recherche tenue le 15 juillet 2022, stipulait que : « la digitalisation des plats du RU a permis de passer de 11 millions à 06 millions de plats servis. Ce qui permet de faire une économie de 400 millions de FCFA » Quelle cruauté ! C’est le lieu pour nous d’exiger une fois de plus que toute la lumière soit faite sur le décès de notre camarade.

Relativement aux allocations sociales (aide FONER, bourse), en plus du fait qu’elles sont insuffisantes au regard du coût très élevé de la vie, elles sont menacées de disparition par les autorités universitaires et politiques à travers la prise au forceps de nouveaux textes anti-étudiants. Pour preuve, à l’UNZ, en dehors des bacheliers de 2021, aucune promotion d’étudiants n’a bénéficié de l’aide au titre de l’année académique 2021-2022 pendant que l’année académique 2022-2023 s’annonce.

Sur le plan des libertés, on assiste fréquemment à des atteintes graves aux libertés syndicales, de manifestation et d’organisation.

Camarades étudiantes et étudiants,

Les causes profondes de la situation lamentable dans laquelle nous sommes plongés sont connues. Elle découle de la nature néocoloniale de notre pays et de la souscription aveugle de notre pays aux programmes d’ajustements structurels. Un sage visionnaire chinois rappelait que : « Si vous voulez détruire un pays, inutile de lui faire une guerre sanglante qui pourrait durer des décennies et coûter cher en vies humaines. Il suffit de détruire son système éducatif et d’y généraliser la corruption. Ensuite, il faut attendre vingt (20) ans et vous aurez un pays constitué d’ignorants et dirigé par des apatrides et des corrompus. Il vous sera alors facile de le vaincre. » Malheureusement, les autorités politiques et universitaires se sont mises à la remorque de l’impérialisme principalement français pour l’atteinte de cet objectif.

Au regard de ce qui précède, en cette année  académique 2022-2023, loin de se décourager, l’ANEB Koudougou appelle l’ensemble des étudiants de l’Université Norbert ZONGO :

  • à s’organiser avec elle pour la défense ferme et intransigeante des intérêts matériels et moraux à travers le renforcement de sa base de masse et,
  • à rester à l’écoute et se tenir prêts pour les futures actions de terrain qui s’avèrent inévitables.

Non à la liquidation des universités publiques !

Pour une université véritablement démocratique et populaire, en avant !

Vive l’ANEB Koudougou !

Vive l’UGEB !

Pain et Liberté pour le Peuple !

Koudougou, le 22 octobre 2022

          Le Comité Exécutif

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