Youssouf Savadogo : « La seule et unique solution pour éviter les coups d’État répétés est la bonne gouvernance »


Ceci est une tribune de l’écrivain Youssouf Savadogo sur la situation au Niger.
C’est avec consternation, déception, accompagnées de larmes aux yeux que nous vivons ces moments désastreux.
Lorsque mon Afrique, notre Afrique souffre dans ce désarroi total. Pour la cause de notre cher continent nous devons nous battre, dénoncer, défendre. Un vieux sage disait : « si tu gardes le silence le jour où tu dois parler, on te traite d’idiot. Et si tu parles le jour où tu dois te taire, on te traite de fou ».
En ce moment où nous avons tous la tête baissée, vu tout ce qui se passe, se vit, se trame, nous pouvons confirmer que l’Afrique semble être une charogne qui attire tous les vautours des autres continents.
Je dis et redis, Pourquoi l’Afrique ? Pourquoi l’Afrique ? Pourquoi toujours l’Afrique ?
Nous avons besoin de savoir, de réfléchir, et de corriger.
L’Afrique que David Diop, Sembène Ousmane, Camara Laye, Nazi Boni, Bernard B. Dadié, Amadou Hampaté Ba, Léopold Sedar Senghor ont tant magnifié, reste au cœur des débats politiques.
Pouvons-nous conclure, que là où coule le miel, toutes les mouches s’y trouvent ?
C’est possible, mais les raisons sont tout autres. Quarante points pourraient certainement justifier les guerres, le djihadisme, les coups d’État, la dictature, etc.
1- la solidarité clanique.
2- la jalousie.
3-la haine entre frères.
4-l’impérialisme.
5- l’ingérence des Occidentaux dans nos affaires politiques et spirituelles.
6- la dictature.
7- l’égoïsme.
8- la négligence.
9- la paresse.
10- l’insoumission.
11- la rébellion.
12- la sorcellerie.
13- l’intolérance.
14- l’amour de l’argent.
15- les enrichissement illicites
16- l’injustice.
17- le favoritisme.
18- la corruption.
19- l’incivisme.
20- le meurtre.
21- la dépendance de la justice au pouvoir d’État.
22- la conservation de fauteuil présidentiel, quoi qu’il advienne.
23- la politisation des armées.
24- la banalisation des violences.
25- la xénophobie.
26- la politisation des services publics.
27- la non considération des compétences.
28- l’orgueil.
29- la stigmatisation.
30- l’ethnicisme.
31- le féminisme.
32- la féodalité.
33- le fanatisme religieux.
34- La radicalisation.
35- la méchanceté.
36- l’indiscrétion
37- l ‘irreligiosité
38- l’arrogance.
39- l’abandon des valeurs intrinsèques
40- la trahison.
Et j’en passe.
Convenons, qu’un coup d’État n’est pas toujours le bienvenu dans une nation. Mais depuis lors, les coups d’État semblent salutaires pour un dénouement de crises socioéconomiques, politiques, etc. Supposons que la démocratie soit meilleure. Lorsque le meilleur ne résoud pas nos problèmes, que faut-il faire? Partout en Afrique, nous constatons que tous les coups d’État perpétrés ont été occasionnés par la mal gouvernance, l’injustice, la corruption et la trahison.
La situation récente au Niger attire notre attention, avec les multiples condamnations : CEDEAO, communauté internationale, etc. Ce qui est marrant, c’est qu’il n’y a jamais de prévention, on laisse la situation se dégrader, se consommer et la censure vient en dernière position. Ce qui complique le dénouement des crises. Qu’est-ce que la CEDEAO a toujours fait pour éviter les crises socioéconomiques et politiques ?
J’ai beaucoup voyagé en Europe, dans la région et dans l’espace CEDEAO, la libre circulation des biens et des personnes est loin d’être une réalité. Jusqu’à l’heure où je rédige cet article, les voyageurs paient avant de traverser certaines frontières. Où est la CEDEAO ? Lorsque les opposants sont emprisonnés, séquestrés, torturés moralement, qu’est-ce que les dignitaires de la CEDEAO ont fait pour éviter ces dérives ? C’est plutôt lorsqu’un chef est touché qu’il y a la solidarité.
Aidez-nous parce que nous sommes déboussolés. Les faibles, les malheureux peuples qui croupissent dans la misère n’ont pas droit à la compassion et à la miséricorde.
Chapeau bas à tous ceux qui se solidarisent avec le peuple du Niger.
Ce sont les vrais Africains qui sont réellement attachés à leur population, et veillent sur leur bien-être. Les autres protègent leurs propres intérêts.
Jusqu’à projeter intervenir militairement dans un pays souverain pour imposer un intérêt individuel. Sans tenir compte de la perte de vie d’innocents citoyens.
Laissez-nous préciser que la vraie démocratie agonise en Afrique.
Parlons de l’actualité.
Les manifestations, les insurrections sont des formes de cris de cœur et de dénonciation pour les faibles, et les peuples brimés. La crise socio-politique qui règne au Sénégal est le résultat de la dictature et la CEDEAO garde le silence. Et lorsque la situation atteint le point de non retour, des voix vont s’élever pour condamner. Quel jeu les leaders africains jouent-ils ? Il est temps que nous revoyons notre système de veille afin de prévenir certaines crises.
L’actualité brûlante du Niger interpelle tout Africain qui rêve de voir une Afrique indépendante et forte. Nous dénonçons tous une intervention militaire au Niger. Quel en est l’intérêt ? Certainement pour rendre service à la France et à certains présidents qui se cachent derrière l’étiquette de la démocratie, pour imposer un système mafieux. Une intervention militaire au Niger est le pire des cas.
En 1989, j’ai vécu les signes précurseurs de la guerre civile au Libéria. Rien n’a été fait pour la prévenir. C’est lorsque la situation s’est détériorée que nous avons vu l’ECOMOG venir quelques mois plus tard. Mais le succès a été en deçà des attentes. Nous nous souvenons comme si c’était hier. En Sierra Léone comme au Libéria plusieurs personnes portent toujours les stigmates de la guerre civile. Nous demandons aux chefs d’État Major des Armées de l’espace CEDEAO de créer une armée forte, pas pour réinstaller des chefs d’État déchus et rejetés par leurs peuples. Mais pour empêcher les terroristes de détruire les populations innocentes. Vous ferez œuvre utile.
Un autre chaos se prépare au Sénégal, si l’on n’y prend garde. Qu’est-ce que la CEDEAO fait pour prévenir ? Nous n’avons pas besoin d’aller plus pour savoir que c’est la pire dictature.
Il est bon de dénoncer les coups d’État, mais n’oublions pas que ce sont les mêmes peuples qui ont voté ces présidents qui prennent position pour soutenir ceux qu’on qualifie de putschistes. Si le peuple qui avait dit oui, dit encore non acceptons alors la position du peuple.
En réalité, ceux qui sont avisés savent qu’à travers l’intervention militaire au Niger, c’est d’autres pays qui sont visés. Levons-nous et soutenons nos frères et voisins nigériens, car un feu qui s’allume au Niger projettera sans doute sa fumée vers les pays voisins. La rancune est visible.
Dénonçons par toutes les voix, chants, écrits, paroles, etc. Le peuple nigérien a besoin d’appui et de soutien.
La seule et unique solution pour éviter les coups d’État répétés, est la bonne gouvernance. Dans ces moments douloureux, soutien au peuple nigérien qui est visé et sanctionné injustement rien que pour satisfaire un groupuscule de personnes.
Vive l’Afrique, vive les chefs d’État africains qui ont choisi la bonne part.
Soyons toujours solidaires pour une Afrique unie et forte.
Youssouf Savadogo
Écrivain burkinabè