Afrique de l’Ouest et du Centre : 31 cas de répression des défenseurs des droits humains recensés par Amnesty International depuis 2018


A l’occasion de la Journée Africaine de la lutte Anti-corruption 2023, Amnesty International a lancé un nouveau rapport sur l’impact de la corruption sur les droits humains dans la région, ce mardi 11 juillet 2023, au siège du bureau régional Afrique de l’Ouest et du Centre de Amnesty International.
Amnesty International a mené des recherches entre 2018 et 2022 sur les répressions et attaques que les activistes de la lutte anti-corruption dans 18 pays de la région d’Afrique de l’Ouest et du Centre ont fait face. A côté de ces recherches, l’organisation a exploré l’impact de ces attaques sur l’état des droits humains d’une manière générale, selon Samira Daoud, Directrice régionale de Amnesty Afrique de l’Ouest et du Centre.
Dans ce rapport qui porte sur 19 pays dont s’occupe le bureau régional d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre, il est mentioné que « les autorités nationales » utilisent divers outils et tactiques pour faire taire et réprimer les Défenseurs des droits de l’homme (DDH) qui luttent contre la corruption.
Elles portent notamment atteinte à leurs droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique, en les accusant de diffamation et de diffusion de « fausses nouvelles », en interdisant des manifestations de façon injustifiée et en perpétrant des attaques personnelles telles que menaces, licenciements, harcèlement économique et actes de torture, lit-on dans le rapport.
Selon ce rapport, 31 cas de répression de DDH anticorruption ont été enregistrés entre 2018-2022, dont des journalistes, lanceurs et lanceuses d’alerte, blogueurs et bloggeuses, militant·e·s d’organisations de la société civile, dirigeant·e·s communautaires et autres personnes qui œuvrent de façon pacifique dans la dénonciation de la corruption et la défense et la promotion des droits humains.
« Bon nombre des DDH luttant contre la corruption qu’Amnesty International a interrogés ont déclaré être souvent menacés verbalement ou en ligne, de façon anonyme ou non, le but étant de tenter de mettre fin à leur travail de lutte contre la corruption. D’autres personnes subissent un harcèlement judiciaire et des pressions pour qu’elles révèlent les sources des allégations de corruption qu’elles relaient au grand public », a déclaré Liliane Mouan, chercheure sur la corruption et les DH en Afrique.
Ahmed Hussein-Suale Divela au Ghana, Martinez Zogo et Jean-Jacques Ola Bébé
Ce rapport note également que certains DDH qui ont révélé des pratiques de corruption ont été agressés physiquement et dans certains cas, ils ont été tués « Trois journalistes luttant contre la corruption dans la région ont été tués depuis 2018 : Ahmed Hussein-Suale Divela au Ghana, Martinez Zogo et Jean-Jacques Ola Bébé au Cameroun. Des acteurs étatiques et non étatiques seraient impliqués dans au moins deux de ces homicides », peut-on lire dans ce rapport.
Amnesty International a souligné également le manque de « cadre juridique solide et conforme aux normes internationales et de système efficace de protection des droits de l’homme au niveau national » susceptibles de garantir les droits fondamentaux et la sécurité des DDH.
C’est pourquoi l’année 2023 est « idéale » selon cette organisation, pour faire changer les choses et associer la lutte contre la corruption à la défense des droits humains. Il s’agit de témoigner aux DDH anticorruption la plus grande solidarité à l’occasion de la célébration des 20e anniversaires de la Convention de l’Union africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption qui a lieu ce 11 juillet 2023 et de la Convention des Nations unies contre la corruption, le 31 octobre 2023, ainsi que du 25e anniversaire de la Déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l’homme, le 9 décembre 2023.
Amnesty International a, pour l’occasion, appelé les États d’Afrique de l’Ouest et du Centre à promouvoir et à protéger les DDH qui luttent contre la corruption, à mettre fin à l’impunité des responsables d’atteinte aux droits humains commises contre ces DDH et à renforcer les cadres nationaux pour lutter contre la corruption et améliorer le respect de l’obligation de rendre des comptes en cas de violations des droits humains et de pratiques de corruption.