Interdiction de coupure des salaires des magistrats : Les précisions de la décision du juge

Afin d’éviter que leurs salaires soient coupés, des magistrats ont attaqué l’Etat burkinabè devant le juge administratif. Le procès a eu lieu ce 17 avril 2020 au Tribunal administratif de Ouagadougou.

Ce sont plus de 120 magistrats qui ont saisi le tribunal administratif pour demander au juge de faire cesser les coupures de leurs salaires pour le mois d’avril. Pour les magistrats, ces coupures sont vues comme un bradage de leurs revenus. «La coupure si elle avait été faite suivant les règles, personne ne s’en plaindrait. Mais là nous sommes dans une situation à la limite de bradage de nos revenus parce que les coupures ont été opérées sans qu’on ne sache exactement de quoi il s’agit », a laissé entendre Emmanuel Ouédraogo, SG du SAMAB (Syndicat Autonome des Magistrats Burkinabè).

Cependant les avocats de l’Etat burkinabè à savoir Me Guy Hervé Kam et Me Céraphin Somé ont demandé la récusation du juge chargé de l’affaire. Pour eux, le Président du tribunal ayant aussi subi des coupures sur son salaire, ne peut pas statuer objectivement. Les défenseurs de l’État du Burkina ont donc quitté la salle d’audience avant la fin du procès en invoquant le nom respect de la procédure.

Le procès s’est poursuivi malgré le retrait des avocats de l’Etat. Pour les requérants c’est-à-dire les magistrats, le retrait de Me Kam et de son collègue était une manière de fuir le débat. Pour eux, le fait que le Président du Tribunal Martin Bambara, soit aussi touché par les coupures ne peut pas constituer un motif pour le récuser. Selon Moriba Traoré, l’un des requérants, pendant la tentative de push de septembre 2015, les magistrats avaient décidé de la suspension des tribunaux pour faire échouer le coup d’état. Cependant, pendant le jugement, Me Kam n’avait pas trouvé de problème au fait que des juges qui ont manifestement participé à faire échouer le push soient désignés pour juger l’affaire. « Comme il s’agit de grève ici, là il trouve qu’ il y a problème », s’est-il insurgé.

Une décision de justice avec une astreinte

Après avoir suspendu l’audience une fois, le juge a statué à sa precise en ordonnant à l’Etat du Burkina Faso de cesser les coupures du mois d’avril sur les salaires de tous les requérants. Par ailleurs, le juge a indiqué que l’exécution intégrale et parfaite de l’injonction de cessation ainsi ordonnée est soumise à une astreinte journalière de dix millions (10 000 000) de FCFA pour chaque jour de retard à la charge personnelle et solidaire de cinq (05) autorités. Il s’agit du Ministre de l’Economie des Finances et du Développement, Monsieur Laasané Kaboré, du Directeur général du budget, Monsieur Vieux Soulama, du Directeur de la solde, Monsieur Michel Paré, du Directeur Général du Trésor Public, Monsieur Célestin Sontéré Sanon et du Payeur Général, Monsieur Zacharie Toé.

Il faut noter que le juge a statué simplement en premier ressort. Il est donc possible pour l’Etat de faire appel de la décision. Cependant la décision rendue par le juge doit impérativement être exécutée pour le fait que le juge a ordonné une exécution provisoire.

Pour les requérants, c’est une victoire. « Ce que nous avons demandé, on a obtenu gain de cause », a déclaré Emmanuel Ouédrago. A la question de savoir s’ils avaient la certitude que l’Etat allaient exécuter la décision rendue par le juge, Emmanuel Ouédraogo a répondu en ces mots : « Nous osons espérer que si nos dirigeants ont de la considération pour les institutions de notre pays, ils respecteront et mettront en exécution la décision qui a été rendue par le Tribunal administratif de Ouagadougou. Ils arrivent que les autorités ne veuillent pas exécuter les décisions mais en de telles circonstances, nous aviserons. Nous ne saurons préjuger de leur mauvaise foi. Nous espérons bien sûre qu’ils demeureront républicains ».

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